Critiques et courants de pensées, 14/12/10.

Publié le par L1 Infocom, Cru 2010/2011.

 

Chapitre 5 : le dialogue des arts.

 

Citation : « J'aime le jeu, l'inconnu, l'aventure : j'aime à n'être pas où l'on me croit. » André Gide.

 

Certains artistes remettent en cause la classification traditionnelle des arts. Ils produisent des oeuvres qui deviennent donc difficiles à saisir, comprendre.

 

Artiste allemand : Gerhard Ritcher, « Deux bougies », 1982.

Cette oeuvre se présente comme une photographie mais s'agit vraiment de deux bougies ? Ou d'une bougie et de son reflet dans un miroir ? Car il y a une bougie sur fond clair et une bougie sur fond sombre. Cette reproduction que l'on a devant les yeux n'est pas une photographie mais une reproduction faite à la peinture et qui cherche à se confondre avec une photographie.

 

Le dialogue entre les arts est une manière de réfléchir sur la création artistique ?

 

Plan chapitre :

1) A partir des années 50, le dialogue entre les arts va remettre en cause l'idée d'oeuvre.

2) Certains artistes tentent de renouer avec l'idée d'oeuvre car lorsque l'oeuvre disparaît, l'art disparaît aussi.

3) Dès l'antiquité les arts se mélangent et se croisent.

 

I. La disparition de l'oeuvre.

 

Pendant des siècles il semblait évident que les artistes réalisaient quelque chose comme une oeuvre et peu à peu, depuis les années 50, le mot « oeuvre » disparaît du vocabulaire artistique.

(Oeuvre = opera en latin). Trois termes l'ont alors remplacé :

 

  • Premier mot : le terme « installation ».

 

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Joseph Beuys, « Plight », 1985.

Un piano, une planche, un thermomètre. Les gens qui venaient le jour du vernissage pouvaient circuler autour du piano. Les murs de la salle est fait pour absorber le son alors qu'on avait placé un piano à l'intérieur.

L'artiste était pilote de chasse durant la seconde guerre mondiale. Il a eu un accident, le corps brulé dans sa quasi totalité. Il a été sauvé par un groupe de nomade qui l'a emballé dans une couverture spéciale. Depuis, il utilise cette couverture dans toute ses oeuvres. Aujourd'hui, cette installation se trouve dans un musée et ne peut donc pas être visitée/touchée n'importe comment. Cette installation suppose alors que l'art puisse sortir des musées. L'expérience artistique est changée.

 

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Marcel Broodthaers, « la salle blanche », 1975.

Salle avec des mots écrits sur les murs et qui sont en relation avec l'art. Cette installation est une critique des musées car il tend à figer l'art, à nier la vie de l'art. On voit les musées comme une sorte de lieu de mort. De plus, dans un musée on ne voit pas les oeuvres mais les préjugés que l'on a sur les oeuvres. Les catégories que l'on utilise pour comprendre l'art deviennent un obstacle à la compréhension de l'art lui même. La critique des musées se fait au nom d'un art vivant. Mais cette installation se retrouve elle même aujourd'hui dans un musée. Cette critique du musée ne survit que grâce au musée.

 

  • Deuxième mot : le terme « performance ».

 

De plus en plus les artistes invitent le public à assister à quelque chose de temporaire.

 

Yves Klein, « Anthropométries », 1960.

Le processus fait parti de la démarche artistique. L'artiste va utiliser un corps de femme nue pour peindre, il va les utiliser comme des pinceaux. Il va leur demander de se recouvrir le corps de peinture qu'il va ensuite, soit trainer sur un tableau au sol, soit elles vont se plaquer sur un mur. La performance ne constitue pas une oeuvre même si elle est quelque chose de vivant.

 

  • Troisième mot : le terme « proposition ».

 

L'artiste se limite à proposer quelque chose mais c'est le spectateur qui en dispose. Les artistes tendent aussi à faire des propositions englobantes, c'est à dire, que nous éprouvons les oeuvres d'abord avec notre corps. Les arts du spectacles sont alors privilégiés par rapport aux beaux arts traditionnels car c'est de l'art vivant.

En renonçant à l'oeuvre, l'art lui même a été remis en cause, la disparition de l'oeuvre c'est la mort de l'art.

 

II. La reconstruction de l'oeuvre.

 

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Jordi Colomer, « Ciao ciao en Maria Helena, 2008.

Artiste espagnol née en 1962 à Barcelone. En 1977, il hésite entre l'école d'architecture et celle d'histoire de l'art. Finalement il va étudier l'architecture en la reliant aux autres arts.

Sous titre du projet de 2008 : les larmes de Dostoïevski (écrivain russe qui avait été ému aux larmes par les textes de Hegel qu'il avait lu dans le désert). L'oeuvre de « En la pampa » est composé de 5 courts métrages, les acteurs ne sont pas des professionnels.

La femme est cadrée presque grandeur nature à un moment de la vidéo, ainsi les gens qui se promènent dans l'exposition donnent l'impression d'entrer dans le film.

 

Jordi Colomer, « Anarchitekton », 2002/2004.

Il va visiter plusieurs villes (Barcelone, Bucarest, Brasilia, Osaka) et il va réaliser une maquette d'un bâtiment important de chaque ville.

Torre Agbar de Jean Nouvel à Barcelone, architecte qui a produit les maquettes des monuments. L'artiste demande alors à un ami de marcher dans le quartier ou est le bâtiment avec la maquette afin d'interpeler les habitants, cela permet de relouer du lien social par les questionnements.

À l'exposition, on voit que l'oeuvre s'incarne dans les maquettes, on renoue avec l'oeuvre sous différentes formes. Ces maquettes font référence à un peintre minimaliste russe Malevitch. Dans l'exposition, les films sont projetés sur les 4 murs d'une même pièce. Il met ensuite au milieu des chaises au centre de la salle, les visiteurs déplacent les chaises afin de voir tel ou tel film. On voit alors que le groupe de chaise évolue tout au long de la journée comme les spectateurs. L'oeuvre s'incarne dans différents objets : maquettes, vidéos, chaises.

 

Tristant et Isolde de Richard Wagner (1865).

Mise en scène : Peter Sellars (2005)

Direction musicale : Esa-Pekka Salonen

Vidéos de Bill Viola.

 

Opéra, musique et vidéos se rencontrent et se rapprochent alors. Ce rapprochement ne va pas aller sans poser problème : faut-il voir la vidéo comme une simple représentation/illustration de l'opéra ? Ou, 2è possibilité, faut-il voir l'opéra comme un prétexte pour hisser au rang d'un art majeur ? L'artiste va avoir l'idée d'utiliser la vidéo comme moyen artistique à l'époque ou les caméscopes étaient utilisés pour les souvenirs de famille. On va retrouver le thème du reflet/illusion dans le travail de Bill Viola avec « The reflecting pool » (1977/1979).

 

Autre vidéo : « The passing », 1991.

Sur la mort de sa mère, il a filmé les quelques jours qui ont précédé son décès. La vidéo est une réflexion sur le passage de la vie à la mort et de l'existence à la non existence. Il va proposer des images qui sont presque des peintures abstraites. Il va filmer des passages sous marins, ce qui deviendra sa marque de fabrique.

 

« Les images en mouvement vivent dans un domaine qui se situe quelque part entre l'urgence temporaire de la musique et la certitude matérielle de la peinture, et sont donc particulièrement adaptées à la création d'un lien entre les éléments pratiques de la conception scénique et la dynamique de la représentation. »

Bill Viola, extrait des notes d'intention publiées dans le programme de « Tristan poject ».

 

Tristan et Isolde de Richard Wagner (1865). Dans le fond on voit l'écran de vidéo ou sont projetés les films (écran bleu) en lien avec l'histoire. Le fait qu'il y ait l'écran peut apporter une limite concernant ce que l'on visionne (davantage la femme ou davantage l'écran).

 

III. La naissance de l'art.

 

L'idée d'une rencontre entre les arts est présente dès l'antiquité. Notamment dans l'antiquité, l'art est mis sous les entités nommés « muse », il n'y a pas qu'un art mais plusieurs arts et chaque art renvoie à une « muse ». On les représente souvent en train de faire une ronde car malgré le fait qu'elles soient plusieurs elle sont unies. À cette époque, lorsqu'on voulait faire une oeuvre d'art, on commençait d'abord par invoquer une muse car elles sont l'inspiration artistique.

 

Adrea Mantegna, « Le parnasse », 1496.

 

Jean-Baptiste Ingres, « La naissance de la dernière muse », 1856.

 

Le tableau montre les 9 muses à la naissance et nées de la même mère.

De gauche à droite : Clio (muse de la gloire, déesse de l'histoire), Terpsichore (muse du coeur et de la danse), Thalie (muse de la comédie), Polymnie (muse des hymnes qui font des louanges aux Dieux et aux héros), Erato (l'amoureuse, muse la poésie érotique), Uranie (déesse de l'astronomie), Euterpe (déesse de la musique), Calliope (muse de la poésie, elle préside la poésie), Melpomène (muse de la tragédie).

Tout les arts ont la même origine et sont nées de la même mère (situé au centre du tableau) : Mnémosynè, déesse de la mémoire.

 

« Mais qui sera l'artiste de l'avenir ? Le poète ? L'acteur ? Le musicien ? Le scultpeur ? Disons le d'un mot : le peuple. » Richard Wagner, « L'oeuvre d'art de l'avenir », 1849.

 

 

Il n'invente pas le concept d'art mais il va lui donner une dimension politique. Face à une oeuvre d'art totale, les hommes tissent un nouveau lien social. La rencontre entre les arts doit permettre une nouvelle conscience politique.

 

 

Partiel : Deux sujets, 1 sujet au choix :

 

Il faudra montrer que l'on sait manier un certain nombre de concept, montrer sa culture artistique et savoir appuyer ce que l'on dit sur des exemples précis vu en cm/td

 

Sujet 1 : citation d'un auteur philosophique => montrer à quoi il fait référence dans le cours

Sujet 2 : partir de l'analyse de deux tableaux vu en cm/td

 

La synthaxe/lisibilité du devoir est prise en compte.

 


 

Chapitre 6 : La mort de l'art

 

Citation : « L'art reste pour nous, quant à sa suprême destination, une chose du passé. » G.W.F. Hegel, « Esthétique volume I », p.34

 

Cette oeuvre est l'acte de naissance de l'art contemporain et a été faite par Andy Warhol, "Brillo Box", 1964. Il décide d'exposer une boite de savon (dans laquelle sont entreposés plein de petites boites de savons) qui ressemble aux vrais boites de savon. Cela ressemble à un ready-made mais ce n'en est pas un car l'artiste ne signe pas son oeuvre. Il n'y a alors plus de différence entre le produit et l'oeuvre d'art. Le ready-made posait la question de la définition de l'art tandis que la Brillo Box ne pose pas de question car elle annonce la mort de l'art.

 

I. Hegel et la double mort de l'art.

 

En 1807, il écrit un livre sur la « phénoménologie de l'esprit ». Il retrace les étapes du développement de la pensée/esprit et ces trois étapes sont : l'art, la religion, et le savoir absolu (ou la philosophie). L'art est une étape qui doit être dépassée et qui a été historiquement dépassée. Si l'art est dépassée, les oeuvres du passé sont pour nous incompréhensibles, on ne peut plus les comprendre (ou comprendre l'art) comme les gens les (la) voyaient à l'époque.

 

Le dépassement de l'art par la religion.

 

L'art grec est la tentative de donner aux Dieux une figure humaine parfaite. C'est représenter l'absolu (Dieu) en lui donnant une figure/image sensible. C'est une tentative d'unifier le divin et l'humain mais on ne peut pas représenter l'absolu dans une figure finie/limitée car dans ce cas la, on perd le caractère divin.

 

L'art comme voie d'accès à l'absolu meurt. La première mort de l'art est la mort de l'art grec.

« Les statues sont maintenant des cadavres dont a fui l'âme vivifiante, de même que l'hymne n'est plus qu'une suite de mots dont toute croyance s'est enfuie. Les tables des banquets des dieux sont vides de breuvages et de nourriture spirituelle. » Phénoménologie de l'esprit, Chapitre VII : la religion.

 

La religion invente un nouveau rapport à l'absolu qui ne passe plus par l'art. Dans la religion chrétienne, l'art va avoir une nouvelle fonction. Dans la bible, deuxième commandement : tu ne me représenteras point, alors que nombre d'églises sur infestées d'images de Dieu. Pourquoi la religion introduit-elle l'art dans les églises alors ? Les images et les oeuvres d'arts sont en quelque sorte une bible pour les illétrés. Dans la religion le sensible peut se déplacer vers l'absolu.

 

Exemples : un « christ en croix » ne représente pas la mort du christ mais il représente le dépassement de la mort, c'est à dire, la résurrection de celui-ci. Jésus enfant ne représente pas la faiblesse et la dépendance de l'enfant mais représente au contraire le pouvoir et la royauté du christ.

 

Cette tentative de rapport à l'absolu va échouer avec l'apparition du romantisme. Le romantisme est la deuxième mort de l'art.

 

Caspar David Friedrich, « Le voyageur contemplant une mer de nuage », 1817.

Il est au dessus des nuages, c'est donc la représentation d'un rapport à l'absolu mais l'artiste a peint le personnage de telle sorte qu'on a l'impression qu'il domine cet absolu. Du coup l'absolu est raté, perdu.

Le romantisme va être animé par une quête de l'absolu.

 

« L'oeuvre d'art est donc incapable de satisfaire notre ultime besoin d'absolu. De nos jours, on ne vénère plus une oeuvre d'art, et notre attitude à l'égard des créations de l'art est beaucoup plus froide et réfléchie (....). Nous respectons l'art, nous l'admirons; seulement nous ne voyons plus en lui quelque chose qui ne saurait être dépassé, la manifestation intime de l'absolu. » Livre Esthétique, p.33.

 

L'art après la mort de l'art.

 

L'oeuvre d'art elle-même ne suffit plus, elle a besoin d'être commentée et expliquée. Et du coup, le contenu de l'art va changer. Son contenu :

  • Tout objet devient objet d'art. On peut faire une oeuvre d'art en représentant n'importe quel objet.

  • Perte de l'art sacrée, il devient un art profane car on ne représente plus des Dieux, saints, déesses mais on représente des choses ordinaires.

  • L'apparition de l'humour dans l'art. Celle-ci remonte à Shakespeare et Cervantès. L'humour c'est autre chose que la comédie, c'est un signe d'une perte absolue.

  • Evocation de la simple vie humaine (dans la peinture flammande).

 

Deux nouveaux modèles :

 

                   1.  La liberté de l'artiste, on va remplacer l'idée de l'art par la figure d'un artiste libre.

 

« Nous sommes arrivés ici au terme de l'art romantique, à ce point de vue moderne dont le caractérise consiste en ce que la subjectivité de l'artiste se met au dessus de l'oeuvre et de son contenu, se regarde comme affranchie de toutes les conditions imposées par la nature déterminée du fond comme de la forme. »

 

primat de la subjectivité de l'artiste dans l'oeuvre. La mort de l'art est alors comprise comme l'apparition de la liberté de l'artiste.

 

                2. L'art comme objet de représentation.

« Ce n'est plus en nous plaçant du point de vue de la culture, de notre culture, que nous serons à même d'apprécier l'art à sa juste valeur, de nous rendre compte de sa mission et de sa dignité. »

 

Le contenu humain est trop pauvre pour l'art. La société bourgeoise se sert de l'art pour représenter ses intérêts mesquins et consuméristes. Perte de dignité = mort de l'art chez Andy W.

 

Conclusion :

 

Il y a une 3è manière de comprendre la mort de l'art, car ça peut aussi vouloir dire que la mort de l'art est la fin d'une certaine manière de comprendre l'art : l'approche historique a pris fin, elle ne permet plus de comprendre l'art aujourd'hui. L'histoire de l'art échoue à comprendre l'art, il faut donc changer notre manière de comprendre une oeuvre d'art en la remplaçant par la philosophie de sorte que ; l'histoire de la mort de l'art c'est la mort de l'histoire de l'art. C'est la naissance de la philosophie de l'art.

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